L’e-commerçant d’ameublement ouvre le 9 octobre à Paris une boutique qui explore aussi bien l’expérience d’achat de demain que l’avenir des meubles eux-mêmes. Reportage.
Comment sera le magasin de demain ? Et comment réconcilier le consommateur avec les boutiques d’ameublement, en pleine désaffection actuellement ? Ce sont à ces questions que se sont attelés Aline Buscemi et Guillaume Lachenal, les fondateurs du site de meubles Miliboo, dont la croissance annuelle dépasse 50%. « Régulièrement les internautes nous demandent où ils peuvent voir nos meubles, explique la dirigeante. Nous avons donc réfléchi à la meilleure façon de compléter notre présence en ligne, en apportant un ‘truc en plus’ pour qu’on vienne nous voir en boutique. » Ce truc en plus prend la forme d’un magasin connecté de 600m² au 100 rue Réaumur, à Paris, qui ne se contente pas de multiplier les dispositifs numériques mais les assemble pour rendre possible de véritables parcours omnicanaux. A quelques jours de son ouverture, ce jeudi 9 octobre, le magasin ultra-connecté de Miliboo a entrebâillé ses portes pour le JDN.
« En tant que cliente, autant je n’aime pas être agressée par un vendeur dès que j’entre en magasin, autant je ne veux pas non plus attendre 3 minutes lorsque j’ai besoin d’un conseil », résume Aline Buscemi. A l’entrée du magasin, une signalétique très visible invite donc le visiteur à télécharger l’application Miliboo ou à se saisir d’une carte NFC personnelle qui accompagnera son parcours en boutique. Soit via les beacons disposés de-ci de-là, soit via les check NFC du visiteur, le marchand va donc pouvoir récupérer des données de localisation pour son CRM. « Si vous avez passé du temps dans l’îlot scandinave mais pas dans le moderne, le vendeur qui vient vous voir le saura, explique par exemple la dirigeante. Nous pourrons aussi pousser des offres personnalisées et vous proposer -10% pendant une heure sur le canapé autour duquel vous tournez. » Deux autres expériences sont également prévues : le parcours du magasin avec des Google Glass, pour l’instant uniquement sur rendez-vous, et bientôt une immersion 3D grâce à un casque Oculus Rift utilisant la solution HomeByMe de Dassault Systèmes. « Vous pourrez, à partir du plan de votre appartement ou de votre pièce, visualiser nos meubles en situation, chez vous. »
Entamons maintenant la visite du magasin. Celui-ci est parsemé de tablettes correspondant chacune à un îlot, qui met en scène une pièce et une ambiance. On y dépose sa carte NFC, la scène et ses éléments apparaissent. Le visiteur choisit un meuble, le met au panier, fait jouer ses points de fidélité. Lorsqu’il retire la carte, il est déconnecté. Pour l’instant, il lui faut se rendre en caisse avec sa carte pour régler sa commande, ou sur une borne libre-service à côté de la caisse. Mais d’ici la fin de l’année, chaque tablette du magasin sera dotée d’un TPE tout à fait classique lui permettant de payer. Le tunnel d’achat se poursuivra donc : il pourra indiquer ses coordonnées de livraison ou sélectionner celles que Miliboo connaît déjà, puis finaliser sa commande.
Outre les tablettes, le magasin est aussi parsemé de « kiosques », grands pupitres tactiles permettant également de retrouver son panier, de visualiser les îlots et d’accéder à l’ensemble du catalogue de Miliboo, y compris les références non présentées en magasin. Et le visiteur qui navigue dans le catalogue voit immédiatement ce qui est en boutique. Là encore, il est possible d’aller jusqu’à l’achat. Et comme sur la tablette, un bouton lui permet d’appeler un vendeur. Tous les vendeurs sont alors notifiés sur leur tablette à eux, jusqu’à ce qu’un d’entre eux indique qu’il va s’occuper du visiteur. Les kiosques permettent enfin de déposer un avis, complément bien sûr très utile aux avis déposés en ligne… et encouragé par l’obtention de points de fidélité.
Quelques mètres plus loin, un immense panneau mural tactile permet de personnaliser son tabouret de bar ou son fauteuil de bureau « Up to you », l’une des gammes phares de Miliboo. Le meuble apparaît en taille réelle, chaque élément étant personnalisable d’une simple pression du doigt sur l’écran, qui met à jour instantanément le prix. Huit vrais tabourets jouxtent l’écran pour que le visiteur s’en fasse une idée parfaite. Et ceux qui préfèrent éviter les gesticulations peuvent gouverner le panneau depuis une tablette. Une fois le tabouret ou le fauteuil conçu, le visiteur le met dans le panier que stocke sa carte NFC.
Pour les canapés « Up to you », le principe est le même, taille réelle mise à part. Un écran tactile permet d’en personnaliser tous les composants, met à jour ses dimensions, son prix et sa date de livraison estimée. « La production reçoit les commandes au fil de l’eau et lance immédiatement les ordres de fabrication, à Annecy, précise Aline Buscemi. Un processus en flux tendu qui nous permet d’en livrer la plupart en une semaine – délai plus qu’honorable pour des canapés sur mesure -, certaines housses demandant jusqu’à quatre semaines. »
Chaque meuble présenté dans la boutique Miliboo est par ailleurs doté d’une grande étiquette NFC. Les possesseurs d’un smartphone Android équipé NFC n’ont qu’à le passer devant l’étiquette pour voir apparaître la fiche produit correspondante, lorsqu’ils ont téléchargé l’application Miliboo. Quant aux détenteurs d’iPhone, pour leur part toujours privés de NFC, ils peuvent néanmoins scanner le QR Code de l’étiquette pour arriver au même résultat. A noter que quelques objets de décoration pourront être achetés sur place. « Nous aurons un petit stock en magasin sur les petits produits best-sellers, indique Aline Buscemi. Quant aux produits commandés, ils pourront être livrés au domicile du client ou en magasin. »
Mais Miliboo ne s’est pas contenté d’imaginer l’avenir des magasins et s’est aussi intéressé à celui des meubles. En commençant bien sûr par le canapé, produit central de son offre et emplacement majeur du domicile des consommateurs. Le prototype de canapé du marchand sait tout faire. D’abord grâce à son accoudoir, qui permet de commander la télévision, de recharger les smartphones par induction simplement en les posant, ou de diffuser de la musique envoyée par bluetooth puisque l’accoudoir se révèle une très bonne caisse de résonance. Le canapé regorgeant par ailleurs de capteurs et la sensibilité des assises pouvant être réglée pour toutes les physionomies, une application d’ergonomie est capable de dire si l’utilisateur est bien assis, s’il devrait s’appuyer davantage sur le dossier… voire de lui envoyer une alerte sur sa montre connectée pour le prévenir qu’il a passé bien trop de temps assis plutôt que debout. Est également prévue une barre de LED sous le canapé pour ne pas regarder la télévision dans le noir tout en évitant les reflets des lampes. Et on peut imaginer qu’il se connecte avec les systèmes domotiques, par exemple pour réduire l’intensité lumineuse lorsque l’utilisateur s’assied ou lance un film… « Potentiellement, ce dispositif peut être mis en place sur n’importe quel canapé, souligne Aline Buscemi. S’il attire beaucoup de demandes, il est très possible que nous décidions de le commercialiser. » Selon les fonctions qu’on désirera, compter entre 500 et 700 euros.
Aline Buscemi ne dévoile pas le montant de l’investissement consenti pour mettre en place ce magasin, mais indique qu’après toute une phase de R&D, une vingtaine de personnes ont travaillé à plein temps sur le projet pendant trois mois. Près du quart des clients de Miliboo résidant en région parisienne, placer la boutique au cœur de la capitale apparaît naturel. Mais la fondatrice admet qu’une fois ce pilote validé, il sera sans doute question d’ouvrir d’autres magasins connectés au deuxième semestre 2015. Idéalement, ce réseau sera d’ailleurs européen, Miliboo réalisant 20% de ses ventes en Espagne, Italie, Belgique, Suisse et Luxembourg, avec une présence plus modeste au Royaume-Uni et en Allemagne. L’objectif : « Faire en sorte que le consommateur ait envie de venir en boutique et soit content de l’expérience qu’il y vit », souligne Aline Buscemi, qui s’attend à ce qu’un réseau de boutiques multiplie par deux le taux de transformation de Miliboo.
Source : lejournaldunet
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